Relaxe en comparution immédiate : la légitime défense reconnue par le Tribunal correctionnel
- Thibaut Pasquire

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Mon client était poursuivi pour des violences : avoir saisi sa compagne par les poignets avant de lui "tordre le bras".
Ce dossier a permis de rappeler le principe de la légitime défense prévu par l’article 122-5 du Code pénal, cadre dans lequel mon client a agi puisqu’il cherchait uniquement à désarmer sa compagne qui le menaçait avec un couteau de boucher.
Le Tribunal correctionnel l’a relaxé, reconnaissant qu’il avait agi en légitime défense. ⚖️
"Des violences conjugales réciproques impliquant un couteau ont été commises sur fond de chantage au suicide et de consommation de cocaïne dans un appartement de Tours, dimanche 26 octobre 2025. Le mis en cause, âgé de 34 ans, a été relaxé par le tribunal.
Ni l’enquête de police, ni l’audience n’auront finalement permis de déterminer qui est à l’origine de la blessure au couteau constatée au bout de son doigt ensanglanté. Il appartient à une femme de 37 ans, domiciliée dans un immeuble proche de la place de la Liberté, à Tours. Après une violente altercation impliquant son compagnon et un couteau de boucher, elle quitte son appartement pour appeler Police secours, à 3 h 20, dimanche 26 octobre 2025.
« Tu vas voir, je vais me suicider pendant que tu dors »
Les policiers dépêchés sur place remarquent tout de suite qu’elle est sous l’emprise de la drogue. Il en est de même pour son compagnon, Maxime G., qui leur ouvre la porte de l’appartement. Les lieux se trouvent dans un « état déplorable ». Après une soirée entre amis, ce couple noué il y a quelques mois avait continué à fumer de la cocaïne. Alors que ses deux jumelles de 6 ans dorment dans leur chambre, la femme va chercher plus de produit. « On n’avait plus de coke ! Elle y est allée, mais elle s’est fait carotter », lâche Maxime G., 34 ans, mécontent « du rapport qualité-prix ».
Le couple finit par aller se coucher, mais la quatrième dispute de la semaine éclate. Sur le déroulé de l’altercation, leurs auditions concordent. « Tu vas voir, je vais me suicider pendant que tu dors », lui murmure-t-il. « Je vais t’aider », répond sa compagne, qui se lève et s’empare d’un couteau dans la cuisine. « Elle me l’a posé sur le flanc, puis au niveau du cou. Je lui disais de faire plus fort », raconte l’homme, affirmant n’avoir jamais touché le couteau. Il finira par vouloir le lui faire lâcher en tordant le bras de sa compagne.
Père de quatre enfants, sans domicile fixe, Maxime G. a déjà été condamné à dix-sept reprises. La dernière, en 2023, portait sur des violences conjugales infligées à son ex-compagne. D’après un rapport médical édité en avril 2025 pour le renouvellement de sa curatelle renforcée, il présente « une altération de son jugement » en raison d'« une psychose avec addiction ». Depuis le box, son mal-être est visible, mais il clame sa volonté « d’arrêter toute cette merde ». Avec elle, il s’imagine un nouveau départ à Chinon, où ils avaient prévu de s’installer prochainement.
Douze mois de prison requis
Des espoirs vite douchés par l’avocate de son ex-compagne, absente mais constituée partie civile. « Aujourd’hui, elle souhaite cesser toute relation avec vous. Elle veut protéger ses enfants et sollicite une interdiction de contact et de paraître à son domicile. » La mesure apparaît nécessaire pour le substitut du procureur, Valentin Blake-Heimburger. Dans ce dossier « de violences conjugales réciproques », il a requis 12 mois d’emprisonnement dont la moitié assortie d’un sursis probatoire.
Le conseil du prévenu, Me Thibaut Pasquire, veut encore croire à la relaxe. « La personne dans le box n’est pas la bonne. Elle aurait dû être convoquée comme prévenue (1). Mon client n’a pas de filtre, il est honnête. Comme très souvent, il a été gagné par ses envies suicidaires », plaide-t-il. Maxime G. aurait simplement voulu se défendre face au couteau pointé vers lui.
« Réaction proportionnée »
Les juges se sont rangés de son côté en prononçant sa relaxe. Le tribunal a estimé que son geste était « une réaction proportionnée » au regard du couteau « posé » sur lui. « Vous avez entendu ? Ce soir, vous ne dormez pas chez elle. Elle ne veut plus entendre parler de vous, lui rappelle la présidente Catherine Bruère. Des jeunes mineurs sont au milieu dans cette affaire, leur sort finirait aussi par en pâtir. »
Nouvelle République - 27 octobre 2025




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